Illustration d'un homme sur fond rouge. Il crie, comme en alerte, il est en meltdown

Si le shutdown est l’implosion, le meltdown est l’explosion. Une crise visible, bruyante, souvent mal comprise. L’image de l’autiste qui se frappe la tête contre les murs est courante. C’est une réalité pour beaucoup de personnes autistes mais ce n’est pas systématique. Toutefois, beaucoup font l’expérience de crises autistiques de manière plus ou moins fréquentes. Le meltdown génère une intense décharge émotionnelle qui peut laisser la personne autiste qui en est victime totalement vidée de toute énergie. Après avoir évoqué les crises autistiques dans leur globalité, je parle du meltdown plus en détails dans cet article. 

📋 TL;DR : Le meltdown en bref

  • Meltdown = explosion (cris, pleurs, agitation).
  • Déclenché par une surcharge (souvent émotionnelle/sociale).
  • Réaction neurologique incontrôlable, pas une crise de colère.
  • Pendant : réduire stimuli, éloigner objets dangereux, présence calme.
  • Après : repos, soutien, surtout zéro reproche.

Les meltdowns, ce sont mes crises les plus violentes. J’y suis habitué, même si j’en faisais plutôt l’expérience fréquente lorsque j’étais enfant. J’ai appris ensuite à masquer et détourner ces crises vers des shutdowns, plus acceptés socialement. Pourtant, encore aujourd’hui, lorsque la charge devient trop forte, je disjoncte et un violent meltdown peut s’abattre sur moi. Il peut même survenir après un shutdown, lorsqu’il n’a pas suffi à réinitialiser mon cerveau.

Le meltdown, l’explosion

De la même manière qu’un shutdown, un meltdown est lié à une surcharge, qu’elle soit sensorielle, cognitive, sociale ou émotionnelle. C’est ce dernier point que l’on retrouve plus souvent comme cause à un meltdown. 

Ce qu’il faut néanmoins rappeler, c’est qu’il y a souvent plusieurs déclencheurs à un meltdown. Il ne s’agit pas d’un caprice ou d’une mauvaise gestion de ses émotions mais d’une réelle réaction neurologique à une crise qui peut trouver son origine dans une accumulations de facteurs ayant mené à la surcharge puis à la crise. Une crise de colère ou un caprice est lié à une demande, quelque chose à obtenir. Dans le meltdown, la personne autiste est simplement victime d’une charge qui a dépassé son seuil de tolérance. Elle ne cherche rien… sauf à ce que la crise s’arrête (AutismOntario, différences entre accès de colère et meltdown). Cela peut la mettre en forte détresse émotionnelle et vivre un chaos intérieur.

Comparaison avec le fight/flight

Je l’ai évoqué dans mon article sur les crises autistiques donc il semble naturel d’écrire quelques mots sur la question. Dans un meltdown, le système nerveux sympathique s’emballe. Cela se traduit par une forte libération d’adrénaline (hormone de la récompense) et de cortisol (hormone du stress), comme l’explique Embrace Autism. Le corps cherche alors à évacuer un excès d’énergie liée à la surcharge, c’est pourquoi on peut l’assimiler à la réponse de stress de type fight (agitation, agressivité) ou parfois flight (fuite paniquée). Pour aller plus loin sur ces deux réponses automatiques face au stress, je vous renvoie vers la page Wikipédia en français.

La différence, c’est que ces deux réponses sont dues à un danger extérieur, alors que le meltdown est du à une surcharge interne. Même si elle est causée par l’extérieur, c’est bien la charge dans le cerveau qui est en jeu. Il y a aussi une distinction de durée à faire. La réponse de stress est ponctuelle, courte, et s’arrête lorsque le danger disparaît. Le meltdown, en revanche, se poursuit jusqu’à 10-15 minutes voire plus d’une heure s’il est intense et que la personne autiste ne peut sortir de l’environnement lié à la surcharge. Ma plus longue crise a duré environ 1h30, alors que j’étais chez moi, et que j’avais pour seule charge l’hypocrisie d’un ami et une injustice que je ne comprenais pas.

Illustration d'un homme qui court, réponse de fuite face au stress, danger représenter par des flammes et des éclairs autour de lui

Les manifestations

On retrouve souvent une panoplies de réactions dans les meltdowns, notamment une agitation motrice élevée, des pleurs incontrôlables, des cris, de l’auto-agressivité. Le stimming s’intensifie aussi très fréquemment, car la personne tente de réguler au mieux un flux d’émotions extrêmement intense.

On peut observer la victime de la crise frapper des objets, des murs ou même son entourage si elle est trop agitée (plus rare) ou sa tête. Deux points importants : lorsqu’elle se frappe ou frappe des choses, il faut comprendre que c’est parce que la douleur perçue (parfois non perçue) est moins forte que la crise elle-même et que la personne autiste cherche simplement à extérioriser. Quand à frapper d’autres personnes, non seulement cela est rare, mais c’est encore une fois hors du contrôle de la personne autiste qui ne cherche évidemment pas à faire du mal. En présence d’un meltdown, il convient donc de ne pas interférer et de répondre au mieux aux besoins du ou de la concerné(e).

Ressenti intérieur

De l’intérieur, la crise est souvent décrite comme chaotique, avec l’idée de chercher en vain à remettre en ordre ses idées, comprendre un conflit, une injustice, le meltdown est souvent plus lié à une surcharge sociale ou émotionnelle, ce qui rend la crise insoutenable. Le chaos est donc total. La personne pense de manière hachée, a des difficultés à formuler ses idées (si elle arrive à parler), et est dans l’incompréhension totale.

Ses hypersensibilités sensorielles se manifestent également de manière extrêmement amplifiée ce qui peut la conduire à réagir de manière très forte à des stimuli qu’elle tolérerait habituellement. Son seul de tolérance est en effet drastiquement diminué. Elle peut donc ressentir une douleur sensorielle extrême (testé, approuvé… des dizaines de fois). Sa seule option est donc souvent la fuite, ou attendre la fin du meltdown.

Illustration d'une femme en détresse, chaos intérieur du meltdown représenté avec une spirale autour d'elle

Le meltdown, c’est un trop plein d’émotions. Il faut alors rappeler que les personnes autistes sont souvent également alexithymiques (difficulté à identifier, comprendre et exprimer ses émotions). Vivre un meltdown, c’est donc vivre des montagnes russes émotionnelles qu’on ne comprend pas. Je sais maintenant, avec l’expérience, le décrire : il s’agit de vivre tristesse, colère, frustration et anxiété tout à la fois. Avant, je me laissais simplement subir la crise sans en comprendre les émotions sous-jacentes.

Comment je vis un meltdown

Mes meltdowns se manifestent souvent pour deux raisons : une surcharge émotionnelle ou sociale (conflit, incompréhension sociale, injustice), et parfois à la suite d’un shutdown quand je n’ai pas réussi à fuir la situation perçue comme dangereuse à temps. Des réflexions à mon sujet qui concernent mon autisme, donc injuste, peuvent également être des facteurs déclencheurs. Souvent, la surcharge s’est développée en plusieurs étapes, mais c’est bien un trop-plein émotionnel qui cause la suite. 

Des meltdowns d’origine émotionnelle

J’ai ainsi vécu mon premier meltdown lié à des émotions positives en juillet 2025, après trois jours à avoir sociabilisé en état maniaque (avec des interactions très positives), organisé une soirée d’anniversaire qui s’était bien passé et m’être rendu à l’anniversaire de ma nièce que j’adore. Après cette dernière soirée, en rentrant, mon cerveau a décidé que j’étais trop enthousiaste et m’a fait disjoncter.

Un meltdown lié à une injustice

En cette même année 2025,  je suis entré en conflit avec un ami qui n’a pas su admettre ses torts et m’a bloqué, m’interdisant de réagir et établir ma version des faits. J’ai ensuite appris qu’il me reprochait des événements liés à ma bipolarité et qu’il n’avait donc probablement jamais rien compris à ce que je vivais depuis 12 ans (13 ans à l’écriture de cet article). Je n’ai donc rien pu faire que subir ce blocage alors qu’il était irrationnel. Pour couronner le tout, il a fini par me souhaiter mon anniversaire alors qu’il m’avait bloqué, ce que j’ai vu comme une forte injustice

À la lecture de ce message, j’ai craqué et commencé un meltdown, dont voici quelques lignes extraites de mon journal :

C’était mon plus gros meltdown depuis plusieurs années. Je me balançais, frappais les murs et ma tête, pleurais et vivais un chaos intérieur extrême.
Mes pensées étaient déréglées, il y avait quelque chose qui clochait et qui manquait d’ordre. Il me fallait réparer ça.

Illustration d'un homme dans une cage, avec cadenas, symbolise l'injustice
Symbole d’injustice avec un homme dans une cage

Ce meltdown s’est manifesté par des balancements d’avant en arrière très intenses, marcher en rond dans mon appartement, le tout en pleurant en continu. Mon corps semblait avoir une source d’eau illimitée. J’en suis venu à hurler dans mes coussins (parfois je hurle tout court) puis à me taper la tête avec les deux mains. Ma mère s’est retrouvée soucieuse après lui en avoir parlé, mentionnant mon besoin de punching ball. Le souci c’est que se frapper la tête extériorise probablement bien plus qu’un punching ball, d’où le choix de mon cerveau de réagir comme ça. C’est toujours probablement mieux que frapper les murs. Ça fonctionne en tout cas pour réduire la surcharge émotionnelle, dans un contexte où je vis un réel chaos intérieur. 

En clair, le meltdown, c’est la crise autistique que je redoute le plus. Elle est intense, brutale, violente, et me laisse drainé de toute réserve d’énergie. Sensorielle, sociale, cognitive et physique. Oui, la crise détruit aussi mes capacités physiques.

Facteurs déclencheurs

J’ai déjà évoqué dans l’article sur les shutdowns divers facteurs donc je vais ici m’attarder plutôt sur le facteur premier déclencheur d’un meltdown, à savoir la surcharge émotionnelle (et plus largement la surcharge sociale). Plutôt que de me répéter, voilà un exemple typique d’un meltdown que j’ai vécu.

J’avais pris une réflexion sur ma manière de parler vite et fort. J’avais donc expliqué que c’était un de mes traits autistiques et on m’a rétorqué que je devais bien m’en rendre compte. On a touché directement à mon identité en me demandant de m’adapter (je ne fais que ça). J’ai fui la situation pour aller boire un jus, équipé de mon casque, dans un bar.
Les stimuli m’ont envahi rapidement et j’ai du quitter le bar pour aller dans la rue. Mauvais timing, mauvaise suite d’événements à risque = le meltdown m’est tombé dessus. Recroquevillé dans la rue, à pleurer abondamment, oubliant les autres piétons, et à me frapper frénétiquement la tête.
J’étais en détresse émotionnelle, ressentant frustration, colère, incompréhension, et tentant comme je le pouvais de corriger le chaos qui régnait en moi.

Autisme123 décrit les facteurs sensoriels et émotionnels comme sources de meltdowns.

Que faire à propos d’un meltdown

Pendant le meltdown

Lorsqu’on est témoins d’un meltdown, on peut agir de plusieurs sortes, que je vais donc simplement énumérer :

  • Réduire la charge sensorielle (baisser la luminosité, parler moins fort (voire ne pas parler si possible), éloigner la foule)
  • Éloigner les objets dangereux
  • Ne surtout, jamais, toucher la personne sauf si elle invite à le faire
  • Ne pas faire de reproches
  • En quelques mots : représenter une présence calme, un soutien
Illustration d'un homme, comme présence à côté d'une personne recroquevillée, en meltdown
Présence rassurante, respectant la distance

Après le meltdown

Après une crise (shutdown ou meltdown), la personne est souvent épuisée, vidée de toute source d’énergie. Je le rappelle, il s’agit là d’affecter toutes les énergies : sensorielle, émotionnelle, cognitive et sociale, mais aussi physique. La personne victime d’un meltdown doit donc se ressourcer et prendre du temps pour se reposer, ce qui peut prendre plusieurs heures, voire plusieurs jours.

Beaucoup de personnes autistes (moi y compris) se sentent souvent coupables après un meltdown (comme décrit par ce post sur Reddit). Il convient dès lors de ne surtout pas leur reprocher quoi que ce soit. Je rappelle que le meltdown est une réponse neurologique autistique incontrôlable, et qui sert pour le cerveau à se protéger d’un danger intérieur. Les reproches ne feront qu’empirer la situation, ce qui peut pousser la personne autiste à se replier encore plus. Un repli qu’il faut d’ailleurs accepter si elle le souhaite.

Si possible, on peut adopter quelques gestes simples : offrir sa présence, un contact, une étreinte serrée. Une aide pratique est aussi la bienvenue : objets pour stimmer, couverture lestée, « comfort drink » (c’est mon équivalent du « comfort food » version boisson).

Recherche de l’autre pendant la crise

J’ai souvenir de ma meilleure amie — en congé amicale actuellement — qui a assisté à de multiples meltdowns (sans que l’on ait connaissance de mon autisme) et a su m’apporter sa présence et un contact qui m’étaient rassurants et sécurisants dans une situation où tout s’effondrait. Lors d’un meltdown le jour de mon anniversaire causé par une surcharge sensorielle, l’absence de cette amie (et plus largement de mon entourage (car j’étais chez moi)) m’a énormément pesé. Je préfère habituellement être seul pendant mes crises mais j’étais cette fois en recherche d’un contact tendre et rassurant, voire d’un câlin serré comme cette amie et quelques autres amis sélectionnés sont capables de le faire. Mais j’étais seul, incapable de réguler un flux d’émotions extrême. J’ai donc du attendre, impuissant, à pleurer à chaudes larmes.

Mes crises pendant mes épisodes bipolaires

Quelques mots seulement sur mes meltdowns en épisodes bipolaires, car ils se manifestent relativement de la même manière que mes shutdowns. À savoir :

  • Je les observe rarement en dépression, puisque je suis moins en contact avec le monde extérieur. 
  • Ils surviennent beaucoup plus fréquemment en épisode hypomaniaque. Mon hypothèse (car le sujet est peu documenté) est que le flux d’émotions intensifiées liées à l’épisode provoque une surcharge massive et plus régulière, forçant mon cerveau à dire « stop ».
  • Le cas des épisodes maniaques est plus compliqué car ces épisodes peuvent provoquer des crises de colère extrêmes qui, chez moi, peuvent se manifester comme un meltdown (car je stim aussi en manie et donc encore plus quand je suis en colère). Distinguer crise maniaque et meltdown n’est donc pas évident. J’estime avoir plusieurs fois combiné les deux et explosé encore plus violemment car le meltdown était associé à l’irritabilité de la manie.
Illustration d'un homme côté gauche euphorique, soleil, et côté droit aux tons rouges, flammes, meltdown
Manie vs meltdown

Un article du Kennedy Krieger Institute explique comment le trouble bipolaire peut se superposer à l’irritabilité et l’agitation décrite dans les meltdowns.

Le meltdown n’est donc pas une simple crise de colère, ni un caprice, mais bien une réponse neurologique à un danger intérieur vécu comme un chaos qui met la personne en alerte critique et détresse émotionnelle. Reconnaître le meltdown pour ce qu’il est — une réponse neurologique incontrôlable —, c’est déjà offrir à la personne autiste un peu de la compréhension dont elle a besoin pour survivre à ce chaos.

📋 TL;DR : Retenir l’essentiel

  • Définition : Meltdown = explosion autistique (cris, pleurs, agitation, parfois auto-agressivité).
  • Origine : surcharge avant tout émotionnelle ou sociale (conflit, injustice, incompréhension), mais aussi sensorielle ou cognitive.
  • Différence avec crise de colère : il ne s’agit pas d’un caprice ou d’une volonté d’obtenir quelque chose, mais d’une réaction neurologique incontrôlable visant à évacuer la surcharge.
  • Durée : souvent 10 à 30 minutes, parfois plus d’une heure si la surcharge persiste.
  • Signes associés : agitation motrice intense, stimming amplifié, hypersensibilités accrues, pensées chaotiques, grande détresse émotionnelle.
  • Pendant la crise : réduire la stimulation, éloigner les objets dangereux, ne pas toucher sans consentement, ne pas faire de reproches.
  • Après la crise : épuisement total (émotionnel, sensoriel, physique). Nécessité de repos, réassurance, présence calme ou étreinte si acceptée.
  • Clé de compréhension : un meltdown est un court-circuit neurologique, pas un défaut de caractère. Le reconnaître comme tel, c’est déjà un soutien.

Par Florent

Flo, développeur et cinéphile. Autiste et bipolaire, je partage ici mes cycles, mes passions et mes découvertes sur la neurodiversité.

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